Saturday, January 29, 2011

Toute l'Europe: Sylvie Guillaume : "Internet ne peut sauver la démocratie"

Toute l'Europe: Sylvie Guillaume : "Internet ne peut sauver la démocratie": "Sylvie Guillaume : 'Internet ne peut sauver la démocratie' Votre commentaire

Dans le cadre des Etats généraux du Renouveau, les 28, 29 et 30 janvier 2011, Toute l'Europe organise un débat intitulé 'Internet et démocratie : vrais alliés ou faux amis?'. Nous vous proposons un entretien avec Sylvie Guillaume, députée européenne (S&D) et intervenante dans ce débat, sur l'impact d'Internet sur la démocratie représentative. Adepte des réseaux sociaux pour sa communication politique, elle se méfie néanmoins de l'idée qu'Internet pourrait remédier au désintérêt des citoyens pour la politique européenne.

Toute l'Europe : Internet était-il important déjà en 2009 lors de votre campagne pour les élections européennes?

Sylvie Guillaume : Oui, bien sûr. J'étais 2e dans la liste du Sud Est, et avec la candidate 4e de liste, Farida Boudaoud, nous avions un blog de campagne commun, où nous rendions compte de toute notre actualité de campagne (déplacements sur le terrain, meetings, etc) mais aussi développions nos propositions. D'autres candidats PS avaient saisi l'occasion de la campagne pour ouvrir des comptes Twitter.


Les Etats généraux du Renouveau, organisés par Libération et Marianne, sont trois journées d'échanges et de rencontres pour réfléchir sur la vie en commun et pour penser l'avenir. Laboratoire d’idées sur le renouveau, ce grand débat de société rassemblera des associations, des fondations, des chefs d’entreprise, des syndicalistes, des citoyens ainsi que des élus toutes tendances politiques confondues. Consulter le programme ici.Mais ce qui compte dans l'utilisation du web 2.0 dont les réseaux sociaux ce n'est pas d'avoir ou pas un compte Facebook ou Twitter, c'est de savoir quel contenu faire passer, et à destination de qui. Ce sont des médias qui doivent être pensés comme les supports plus classiques (tract, journal, etc.) et l'on doit se poser les mêmes questions dans leur utilisation : quel est le message que je souhaite faire passer, à qui, dans quel but.

TLE : Comment les réseaux sociaux (facebook et twitter) changent-ils votre façon de faire de la politique ?

SG : La principale caractéristique de l'utilisation des réseaux sociaux est l'immédiateté. En une seconde, on informe tous nos abonnés du lieu ou on se trouve, de la réunion à laquelle on participe, des idées que l'on défend quand on prend la parole en séance par exemple, ou des gens que l'on rencontre.
Mais vu les contraintes de place, j'utilise surtout ces réseaux sociaux comme relai vers un contenu plus long et riche que 140 caractères : je m'en sers pour renvoyer vers mon blog, vers des articles de presse, etc.

Et bien évidemment, ce sont des lieux interactifs, où les lecteurs réagissent, et auxquels nous répondons. Ce qui est déjà un mode courant depuis longtemps avec le principe des commentaires sur les blogs. C'est une continuité et un développement.

TLE : Les députés européens sont éloignés de leurs circonscriptions, les réseaux sociaux peuvent-ils créer une proximité vos électeurs ?

SG : Il faut se méfier de l'idée qui voudrait qu'Internet peut sauver la démocratie, lutter contre l'abstention, et amener des pans entiers de la population à s'intéresser au travail des élus. Il ne faut pas oublier que les personnes que l'on touche par notre communication en ligne sont des personnes qui s'intéressent à la politique, éventuellement des sympathisants, des réseaux associatifs, ainsi que la presse et les réseaux pro-européens au sens large.

L'utilisation des réseaux sociaux permet principalement d'améliorer la qualité de la relation qu'on entretient avec ces personnes déjà intéressées.

Je me méfie notamment du sophisme qui dit : Twitter et Facebook sont utilisés par les jeunes, les élus se mettent sur Facebook et Twitter, donc les élus touchent les jeunes. Je ne dis pas que cela n'arrive pas du tout, mais c'est un effet rebond.

Sylvie GuillaumeSylvie Guillaume a été élue députée européenne de la liste socialiste du Grand Sud Est (Rhône Alpes, PACA, Corse) en juin 2009. Elle travaille particulièrement sur les dossiers concernant l’harmonisation européenne du droit d’asile et les droits de l’homme. Militante et responsable locale et nationale du Parti Socialiste depuis 20 ans, issue du secteur de l’économie sociale et solidaire, elle est également adjointe au Maire de Lyon déléguée aux affaires sanitaires et sociales et à la solidarité.

TLE : Y a-t-il un risque d'un effet de distorsion de perspective par des campagnes de lobbying en ligne? Ou au contraire le web est-il devenu le lieu de débat représentatif de l'opinion publique ?

SG : En effet, l'effet de distorsion des campagnes de lobbying en ligne est réel. Il arrive régulièrement que nous recevions, notamment par mail, des centaines et des centaines de mails copiés collés, par quelques activistes qui créent pour l'occasion des adresses mail ad hoc pour faire un effet de masse. Envoyer plusieurs milliers de mails est très simple, en fait, ça ne prend pas tant de temps que cela. Ces campagnes de spams peuvent avoir aussi un effet contreproductif.

TLE : Quel sera l'impact de l'internet sur les élections européennes en 2014?

SG : Les élections européennes souffrent d'un désintérêt médiatique et citoyen très important, et l'abstention est très forte. Mais l'utilisation du web et des réseaux sociaux n'a rien de magique sur ce sujet, à mon avis. C'est un enjeu plus politique, de fond, plutôt que de forme.

Par exemple, le renforcement des pouvoirs du Parlement grâce au traité de Lisbonne est pour moi bien plus à même de mobiliser les électeurs. Si les parlementaires se saisissent pleinement de leurs nouveaux pouvoirs (comme ils l'ont fait sur SWIFT, mais pas sur le budget, par exemple), et réussissent à sensibiliser les citoyens sur le fait qu'ils sont pleinement représentés, je pense que cela aura un bien plus grand impact que le nombre de comptes Twitter ouverts par des eurodéputés.

L'utilisation des réseaux sociaux est un complément à notre action politique, pas une fin en soi.


En savoir plus :

Les Etats généraux du renouveau - Toute l'Europe

Dominique Reynié : 'Les partis extrémistes surinvestissent le web' - Toute l'Europe

Le blog de Sylvie Guillaume, députée européenne socialiste



– Envoyé à l'aide de la barre d'outils Google"

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